Olkhon est une île magique avec une énergie chamanique et des paysages envoutants.

C’est aussi une île qui attire toutes les convoitises.

Nous sommes arrivés sur cette île après avoir fait la rencontre de Nastia et Pacha qui nous ont hébergé à Irkoutsk. Nastia et Pacha (diminutifs de leurs prénoms Anastasia et Pavel) sont des hôtes de couchsurfers et nous ont généreusement accueilli chez eux au petit matin avec un petit-dèj et de grands sourires. Pacha nous a ensuite fait découvrir la ville au pas de course, ses petits coins secrets, un chouette point de vue, une balade en bord de rivière (l'Angara, qui se jette dans le lac Baïkal), le meilleur endroit pour manger des Pozi. Les Pozi, c’est une spécialité bouriate (les bouriates sont un peuple très proche des mongoles, et Irkoutsk et le lac Baïkal se trouvent en république de Bouriatie) qui ressemble à de grosses raviolis à la viande. Il faut la croquer sur le côté et aspirer (si possible en faisant du bruit) le bouillon à l’intérieur pour ne pas qu’il s’échappe dans l’assiette. Mathieu adore !

C’était très sympa de passer la journée avec ce couple ouvert et sympathique. Ça faisait vraiment plaisir à Pacha de nous montrer cette ville sous le jour qu’il préfère. C’était aussi un premier warning pour moi : après une nuit quasi blanche (nous étions arrivés à la gare en plein milieu de la nuit), je n’ai pas profité pleinement de la journée à cause de la fatigue. Nous ne sommes pas simplement partis pour une semaine de voyage, il va donc falloir intégrer dans nos journées et nos semaines des moments de repos tout comme nous le ferions en France. Et ce, même si nous nous trouvons à l’autre bout de la planète avec des milliers choses qu’il faut absolument voir… Les choses attendront, ou même continueront leur vie sans nous !

Après Irkoutsk, direction Olkhon, la seule île habitée du lac Baïkal. Nous montons dans une marchroutka (sorte de mini-bus) tout terrain avec d’autres passagers. Ça m’amuse de redécouvrir ce moyen de transport qui colle bien avec les besoins. Ici, dès qu’on sort d’Irkoutsk, plus de macadam. Les routes sont plutôt des pistes sableuses avec des énormes nids de poules (rien à voir avec les nids-de-poule français contre lesquels on peste). Notre chauffeur est un pilote ! Il double toutes les autres voitures ou marchroutka, klaxonne les vaches qui s’éternisent sur la route, musique à fond, c’est parti pour 5 heures de routes cabossées… inutile de songer à dormir !

Au ferry qui nous fait passer sur l’île, je reconnais Sergueï et nous allons à sa rencontre. Sergueï est le gardien de la seule église orthodoxe du seul village de l’île. Il offre volontiers son aide, son terrain, une tente aux voyageurs de passage et c’est justement chez lui que j’étais restée lors de mon dernier séjour il y a 3 ans. Et hop, nous nous retrouvons à l’arrière de son 4x4 pickup, les cheveux à la poussière, direction Philoxenia, le nom du site et de l’église. Une grande tente dans son jardin entourée d’autres plus petites sera notre lieu de résidence pour les prochains jours. Le confort est rudimentaire : toilettes dans une cabane à l’ancienne, l’eau du lac au seau, une mini cuisine… Nous dormons sur un matelas, et ça c’est déjà top ! Finalement, nous n’avons pas besoin de grand-chose.

Nous allons cohabiter avec Vitia (Victor), Ira (Irina), Andreï…

Vitia est le plus ancien ici. Il est d’Oulan-Oude et cela fait plusieurs années qu’il passe ses étés ici. Il a notamment aidé Sergueï à construire sa maison entre autres. Cet été comme l’année dernière, il est venu avec son kayak et ses 4 paddle. Il propose ses services aux touristes sur l’île. Comme beaucoup, Olkhon et le tourisme qui s’y développe est une aubaine pour tous ceux qui cherchent à se faire un peu d’argent. Il a une allure plutôt marrante avec tous ses tatouages colorés et sa plume dans sa casquette. Mais Vitia ne se laisse pas approcher si facilement… il nous aura fallu une petite semaine pour finalement entrer dans une relation plus détendue et amicale. Je pense qu’il n’a pas apprécié que nous refusions sa proposition d’aller faire du paddle. Nous ne souhaitions pas dépenser notre argent dans une activité qui nous plaît moyennement. Et puis il parle peu anglais et moi peu russe, ce qui laisse peu d’espace à la communication verbale. Mais nous arrivons petit à petit à échanger. Hier, il a cuisiné des blinis et du borsch pour tout le monde, et avec un grand sourire. Tout à l’heure, nous avons aussi bien ri : je lui raconte ce qu’on vient d’entendre d’un groupe de français passant devant. « La première fois qu’on est passé ici, souviens-toi, il y avait plein de vaches. Et puis la fois suivante, plein de chinois… ». Haha !

Les chinois arrivent en masse ici depuis quelques temps. On les barricade dans des hôtels standards. Je trouve que ça dénature l’île et c’est très triste. C’est aussi des quantités de déchets qui arrivent, des nouveaux « besoins » qui demandent plus de consommation, et des relations avec les locaux qui deviennent commerciales avant tout. Cette île désertique change… pour le pire peut-être. J’admire la résignation de Sergueï : « la vie se chargera de décider du devenir de l’île. »

Sergueï aussi tire parti du tourisme naissant. Dans cette maison qu’il a construit de ses mains et avec tous les voyageurs qu’il a hébergé gratuitement, il a créé des chambres privatives qu’il loue pendant la saison à prix d’or ! Il est généreux ce qui ne l’empêche pas d’avoir le sens du business.

Nous avons également passé beaucoup de temps avec Ira. A l’inverse de Vitia, le contact a été extrêmement facile. Ira est lumineuse et avenante. Elle vient d’Angarsk, une petite ville près d’Irkoustk. Elle aussi est arrivée sur l’île il y a 3 semaines avec l’espoir de se faire de l’argent. Elle a plein de compétences à monnayer : elle parle anglais et chinois, est un excellent guide, donne des cours de yoga… Voilà seulement aujourd’hui qu’elle a trouvé une place chez Nikita, une auberge très réputée. Elle quitte donc le campement… Dommage, on ne s’ennuyait pas avec elle !

Bon, c’est le moment d’aller filer un petit coup de main à Sergueï avec Andreï. Et puis après, on ira se baigner dans le lac. Ça porte bonheur paraît-il. Du bonheur pour de nombreuses années j’espère ! Nous y allons presque tous les jours pour nous laver. Elle est plutôt glacée, 12-13 degré selon Mathieu. C’est bon pour la circulation du sang