Ce matin, je découvre cette forêt de pins où nous avons installés hier soir notre tente à la lampe torche. C’est calme. Nous entendons quelques pics-verts qui cognent l’écorce des arbres. Mathieu vient de voir trois biches passer à 50 mètres de lui. La journée d’hier qui nous a amené au fameux parc national Yosemite a été bien longue et très éclectique. Nous avons d’abord découvert les 9 petits poussins noirs du jour tout mignons que la grosse poule noire avait bien cachés. Et puis j’ai aidé à la mise à mort du pauvre Bow, un bouc que j’adorais. Il souffrait tellement depuis 3 jours. Je lui ai apporté beaucoup de caresses et d’amour avant que Mike ne lui mette une balle dans la tête. Une mort aussi rapide que l’éclair. Après « autopsie », il s’est avéré qu’il avait avalé un bout de bois qui bloquait l’accès de ses aliments en transit vers ses intestins. Le pauvre Bow avait un ventre tellement énorme. Halle l’aimait trop pour le manger et ce n’était pas sa destinée. Nous avons transporté son corps jusqu’au fond de la pâture. Halle a préféré l’offrir aux vautours pour qu’il revienne dans le cycle de la nature. La mort fait partie de la vie. Après cela, nous avons fait nos aurevoirs à Mike et Halle pour clôturer 2 semaines dans leur petite ferme. Ils sont adorables. Et puis nous avons loué une voiture et direction Yosemite, en passant par la case « longues heures de bouchons » dont nous n’étions plus habitués… Quelle journée !

J’ai adoré nos deux semaines à la ferme. Mike et Halle, qui nous ont accueillis, sont un couple de retraités de l’enseignement. Mais ils n’ont pas été des enseignants classiques. Ils ont notamment travaillé dans des écoles aux quatre coins du monde : Thaïlande, Bolivie, Turquie, Kazakhstan, Russie… La passion de Mike pour les oiseaux et leurs envies de voyages les a emmenés à peu près partout. Ils n’en ont pas l’air comme ça, mais ce sont de vrais hippies. Discussion, bien installés dans des chaises pliantes, dans un parc qui offre un concert à ciel ouvert :

Priscilla : « comment tu définis le hippy ? »

Mike, lissant sa moustache : « le hippy est contre le système. »

Priscilla : « quelle est la différence avec l’anarchiste ? »

Mike : « L’anarchiste est violent, le hippy est « peace and love » »

Priscilla : « Je suis une hippy alors ? »

Mike : « Bien sûr, tout comme nous. »

Ce n’est finalement pas à San Francisco que l’on trouve les vrais hippies, mais bien dans l’arrière-pays. Dans cette province de Mendocino, dans les environs de Ukiah, coexistent de nombreux groupes ethniques et des homosexuel(les) qui ont choisis le style de la vie à la ferme plutôt que la vie à la ville. Des blancs, des natifs (descendants des indiens), et beaucoup de mexicains (l’Etat de la Californie borde le Mexique). Ici, on déteste Trump. Sur le marché, une amie de Halle s’excuse auprès de nous : « Nous sommes vraiment désolés de tout ce « trumpisme ». Nous n’avons pas voté pour Trump. Nous n’avons plus assez de mouchoirs pour pleurer. » Chaque action ou parole du président est déplorée ici avec grande désolation. Des scénarios de Californie indépendante émergent par-ci par-là dans les conversations. Elle pourrait se le permettre. La Californie, avec la Silicon Valley est l’état le plus riche des Etats-Unis, et se positionne à la 6ème place mondiale. Mais l’état est divisé, entre ruralité et urbanisation à outrance avec Los Angeles et San Francisco. Entre la vie simple de la ferme et l’argent de la Silicon Valley qui coule à flots. Même à la campagne, les prix des habitations commencent à sérieusement augmenter, par ricochet depuis Google and Co. Les pro de la tactique politique ont lancé dernièrement un projet de division de cet état en trois. Selon Halle, ce n’est qu’un calcul qui viserait à rapporter quelques voix de plus aux Républicains de Trump. Mais ce n’est pas encore pour demain.

La question de l’eau, présente en grande quantité au nord et qui approvisionne tout le sud, est un sujet très important. Et c’est vrai, les paysages ici sont incroyablement secs. Des prairies jaunes à perte de vue. Seuls les cours d’eau et les forêts de pins apportent naturellement de la couleur verte. L’eau. Ben, un jeune fermier dans le voisinage, reste ici notamment parce que l’eau n’y est pas très chère. Dans une région où il n’est pas rare de voir un été entier sans une seule goutte de pluie, aucune culture ne pousse sans irrigation. Même les vignes sont arrosées. Seule la fraicheur de la nuit permet un peu de rosée naturelle. Un jour, Halle nous explique que les pâtures vont bientôt être inondées car le barrage a été ouvert. Nous voyons l’eau arriver petit à petit et créer une belle piscine dans le parc à cochons (non pour leur déplaire !). Les voisins gèrent l’eau avec des petits barrages individuels. En ce moment, une connaissance d’Halle et Mike diffuse un film sur l’eau et l’un des plus gros barrages dans la région. Des gens se regroupent plusieurs fois par semaine, regardent le film et en discute. L’eau et sa biodiversité. Il n’y a plus beaucoup de saumons (entre autres éléments de la biodiversité) qui viennent dans la région. Les barrages, essentiellement créés pour alimenter les villes en eau et en énergie, sont sérieusement mis en cause. La question de démonter le principal se pose fortement. Mais bien sûr, les conséquences ne plairaient pas à tout le monde, asséchant une vallée, irriguant une autre. Nous goutons la fraicheur de l’eau à plusieurs reprises en descendant la rivière en kayak. Quelle merveille que cette eau transparente et glacée. Et tout autour, la forêt, la nature, le calme. Des tortues qui prennent le soleil sur les roches, un vautour qui a dû repérer une charogne, des canards à houppette, des aigles au-dessus de nos têtes. Nous n’en verrons pas, mais il y a aussi bien sûr des ours (emblème sur le drapeau de la Californie). Nous ne sommes que fin juin, et déjà par endroits nous devons porter notre kayak qui racle le fond, le niveau de l’eau étant trop bas. L’été est très chaud dans cette partie de la Californie. Les jours de très forte chaleur, le thermomètre grimpe jusqu’à 104°F (40°C). Heureusement que les nuits sont fraîches.

Mike est souvent caché dans sa caverne ou son studio de céramique. Je crois qu’il fait une sorte de dépression. Le contre-coup de se voir diminuer physiquement avec l’âge. Dans ses bons jours, nous nous amusons avec Mathieu à le regarder grogner ou piocher dans le pot de glace comme un enfant qui n’en aurait pas trop le droit, avec Halle dans le rôle de la maman bien sûr. Elle surveille de près son alimentation qui doit être limitée en sucre à cause de son diabète. C’est génétique, me dit-il, plusieurs en sont morts dans ma famille ». A table, il a toujours des histoires exagérément incroyables de ses voyages à raconter. Il devient marrant quand on apprend à le connaître. Dans son studio formidablement équipé et artistiquement bordélique, il reste des heures à penser, à chercher l’inspiration. Il crée toutes sortes de jolis pots, plats, bols en céramique, et puis il fume du cannabis. C’est légal ici, tout le monde le fait. La Californie a été le premier état à le légaliser. Et puis pour lui ce n’est rien. Il a déjà gouté à tellement de champignons, acides ou potions magiques au milieu de la pampa en compagnie de chamans amérindiens ! Stacey, la fille aînée d’Halle, habite la petite maison juste derrière avec son mari indonésien prénommé Bing. Ce dernier cultive, entre autres, la plante magique. L’air s’emplit de son parfum avec les rayons du soleil. C’est une jolie plante qui, avant d’être cataloguée « drogue douce », est surtout une plante médicinale. Son interdiction généralisée dans le monde en fait un objet de convoitise très précieux. A San Francisco, c’était hallucinant de voir ces magasins de « weed » avec leurs étals de pipes, bangs et autres accessoires de toutes les formes et toutes les couleurs pour fumer cette plante qui sent si bon. Une imagination débordante ! Bing et Stacey partent quelques jours pour un festival de musique. Mathieu prend très au sérieux sa mission d’arroser les plants chaque jour. Nous discutons pas mal avec Bing. Il nous explique que malheureusement, la législation devient de plus en plus compliquée pour les cultivateurs de cannabis. Par exemple, il devrait avoir un bac à compost spécial qui ferme à clé pour ses déchets verts de cannabis. Ici, ce sont les chèvres qui s’en régalent ! Il nous explique que le marché est beaucoup moins profitable qu’avant. Le prix de vente a fortement chuté en 10 ans et les coûts dûs à la législation augmentent fortement. Son marché est trop règlementé. Selon Halle, ce sont les gros qui font les lois et ne se soucient pas des petits fermiers… Un scénario bien connu.

Halle, quant à elle, est la reine de l’autosuffisance. Elle gère son jardin, ses animaux, la conservation des aliments et la cuisine. Elle a une énergie débordante ! Déjà gamine, elle était un garçon manqué, préférait les pantalons et le bricolage. Elle a une âme de scientifique et veut tout comprendre. C’est donc la première à prendre le couteau et à ouvrir le ventre de Bow ou encore le jabot d’une autre poulette malade pour voir d’où vient le mal. Sa cuisine et ses placards sont un régal pour les yeux. Elle sait tout transformer et conserver : les fruits, les légumes, les herbes, les sauces, les plats cuisinés. Elle maitrise les techniques des bocaux, de la déshydratation, de la conservation dans l’huile, dans le vinaigre, dans le congélateur… J’en apprends des choses avec elle. Son jardin, sans pesticide bien sûr, est optimisé. Avec Mathieu, nous l’aidons à désherber, tondre, arroser, planter, pailler, préparer le compost et notre mission préférée, cueillir les framboises. Nous en mangeons presque à tous les repas, nature, en glace, en tarte ou en confiture. Miam !

Quelle cuisinière ! Halle a des origines grecques et a appris à cuisiner avec sa grand-mère, celle-là même qui voulait qu’elle mette des robes ! Ses talents se sont enrichis d’autant plus des cuisines du monde où elle a vécu par la suite. Nous nous régalons et aidons à préparer les roulés de feuilles de vignes, sa divine polenta, sa salade de chou et de maïs, ses sushis… Nous faisons même, spécificité américaine, des pizzas au barbecue !

Bon, dans la famille Brady, on n’est pas franchement végétarien. Il y a beaucoup d’animaux dans la ferme, mais tous ne sont pas destinés à la casserole. Il y a d’abord le vieux gros chien Leo, qui ressemble un peu à un lion à lunettes et qui a une fâcheuse tendance à venir nous piquer nos affaires dans la salle de bain (RIP la brosse à dent de Mathieu). La maison possède des entrées sur tous les côtés. Tous les jours, le même running gag. Leo aboie pour entrer à la porte principale, fermée, alors que celle de la cuisine est ouverte. Par la baie vitrée, Halle lui fait de grands signes mêlés de « Come On, Leo ! » pour lui faire comprendre. Chaque jour, les mêmes efforts, en vain. Quelqu’un cède et va lui ouvrir. Il est un peu dur de la feuille. Sinon, il y a aussi le jeune Jack Russel Henk, le petit dernier préféré d’Halle. Il a tendance à tout enterrer. Et il a une dent contre les outils de jardin et les roues. En nettoyant un bout de terrain, Mathieu retrouve une pelle portée disparue depuis des semaines. Avec le chat Sunny, ils font des parties de rigolades, qui ressemblent plutôt à de la lutte, à n’en plus finir. Mike de préciser qu’il faut les laisser, c’est leur business, ils passent leur temps à se chercher l’un l’autre.

Dans une petite pâture, il y a(vait) la chèvre Diana et le bouc Bow ainsi que leurs deux petits chevreaux, Salt et Pepper. Ils ont à peine une semaine lorsque nous arrivons. Ils sont trop mignons avec leurs grandes pattes maladroites. C’est fou de voir comme les deux n’ont pas du tout la même personnalité, l’un beaucoup plus curieux, qui nous grimpe dessus et nous mâchouille le T-shirt, et l’autre plus réservé qui préfère éviter les caresses. Nous voyons grandir rapidement leurs petites cornes. Malheureusement, ce sont deux males. Leur sort en est donc jeté. Ils finiront plus tard à la casserole. Halle aurait espéré avoir au moins une femelle. Elle veut faire du fromage. Elle en fera avec le lait de Diana quand les chevreaux seront suffisamment grands. Elle leur laisse l’exclusivité du lait en attendant pour qu’ils prennent des forces. Au début, Halle doit tenir Bow à l’écart des petits car il est violent avec. Elle n’a pas peur d’affronter ses cornes quand il est en colère ou se montre particulièrement têtu. Quelle poigne, une sacrée bonne femme ! C’est elle aussi qui prend en charge la castration de ces deux chevreaux avant qu’ils ne deviennent très agressifs et se mettent à puer (vous connaissez l’expression puer le bouc ?). Aïe ! Cette expérience aux côtés d’Halle me fera d’ailleurs vraiment prendre conscience qu’avoir des animaux, et particulièrement de gros mammifères, est une sacrée responsabilité qu’il ne faut pas prendre à la légère, casserole ou pas.

Dans le grand parc, il y a une dinde et un ému. J’aime pas cet ému. Quand j’entre dans le parc, il essaie de me becter et de prendre le dessus. Il a ses têtes. Alors je suis contente lorsque Henk l’embête à le courser pendant des heures. Hihi ! Halle élève aussi des cochons (ceux-là sont tout de même franchement plus heureux que ceux que nous avons pu voir en Asie) pour les besoins des carnivores. Certains pour la famille, d’autres qu’elle vend. Et puis bien sûr, les stars préférées d’Halle, les poulettes. Elle n’en a plus beaucoup ces derniers temps. Entre les ratons-laveurs, les rats, les chats sauvages, les corbeaux géants, il faut mettre en place un dispositif de haute sécurité pour protéger ses poulettes pondeuses et leurs œufs. Il y a quelques années, une jeune poulette s’était faite grignotée par un rat. Halle l’avait retrouvée une patte en moins et les boyaux sortis. Elle l’avait recousue et la poulette s’en était sortie. Même si elle ne pond pas, Halle s’est attachée à cette petite force de la nature et la garde. Mais pendant notre séjour, l’unijambiste a commencée à se faire becter la tête par ses collègues. Pas de sentiments entre bêtes à plumes. Nous la mettons à l’écart pour la protéger. Et puis un matin, disparue ! Dans la 50aine de poules, il y en à une 20aine qui ne pond pas encore. Nous aurons la chance de voir leurs premiers œufs miniatures ! Halle vend ses œufs sur le marché d’Ukiah. Nous l’accompagnons un samedi matin. Il s’agit d’un tout petit marché où les fermiers du coin viennent vendre leur production. Ils ont mis en place un système super sympa pour dynamiser le marché et pour aider les personnes à très faible revenus à bien manger. Ces derniers peuvent acheter des jetons pour moitié prix de leur valeur sur les étals. L’opération a été financée par des aides et des levées de fonds. Ainsi, les gens très modestes ne sont plus relayés à des consommateurs de second rang avec de la junk food mauvaise pour leur santé comme unique option. Je trouve cela génial ! Les œufs d’Halle partent en moins d’une heure. Entre les récents prédateurs et les poulettes qui tardent à pondre, elle a moins d’œufs que d’habitude. De toute façon elle va arrêter le marché. Avec sa retraite, elle n’a pas vraiment besoin de cet argent. Et puis elle préfère se mettre dans un réseau de type AMAP, beaucoup moins contraignant pour une si petite production. Et puis, Halle se réjouit de laisser sa place et d’aider tous ces jeunes fermiers. Elle est un soutien précieux à plusieurs d’entres eux dont le fameux Ben, un fermier voisin, qui habite dans un bus sans électricité et qui se donne à fond pour faire pousser ses légumes et élever ses cochons. Un soir, nous nous retrouvons à aller le secourir à 1h30 de route de là. Il est tombé en panne avec sa vieille camionnette et il a 6 petits cochons dans une remorque. Nous attelons la remorque à la nuit tombée. Sacré Ben !

Un soir, nous le retrouvons au seul bar de Potter Valley. Ce petit bar a des allures de Saloon, tout en bois, avec des têtes d’élans et de cerfs accrochés au mur. Une curiosité locale. Il y a beaucoup de fermiers qui viennent ici. Principalement des jeunes. Mike et Halle ont décidé de venir avec nous. C’est pas souvent qu’il y a des « vieux » dans ce bar. Mais ça ne les dérange pas le moins du monde, à l’aise partout, et les jeunes les adorent. Mike est dehors. On fume à l’extérieur. Ça sent la weed. Halle fait une partie de billard avec nous. Danielle se joint à la partie. Elle est américaine et habite aussi chez Mike et Halle. Elle est venue ici en volontariat l’année dernière, et puis a décidé de suivre une formation d’agriculture qu’elle vient juste de clôturer. Avec son style de cowgirl, elle se verrait bien avoir sa propre ferme. Mais elle ne se sent pas encore assez sûre d’elle pour se lancer. Et puis il faut beaucoup d’argent. Elle cherche des mentors, de l’expérience. Elle rend notamment visite à la vieille dame de 100 ans qui habite dans la vallée de Redwoods et qui élève encore des moutons toute seule. Les Brady la soutiennent et l’encouragent. Lorsqu’il s’agit de tuer les deux poules malades, c’est Danielle qui s’y colle. Halle se tient à l’écart pour la laisser se débrouiller et gagner en confiance. Elle veut se faire la main.

Au retour du bar, un cerf sur le bord de la route. Il y en a énormément. Il y a aussi des élans, apparemment quatre fois plus gros que des cerfs, mais nous n’aurons pas la chance d’en voir. Force est de constater que les Etats-Unis est un pays immense. A peu près 17 fois la superficie de la France et seulement 5 fois plus d’habitants. C’est beaucoup plus facile de se retrouver perdu au milieu de nulle part ici qu’en France. Il y a donc beaucoup plus d’immenses espaces sans routes où la nature peut prospérer et créer des « géants » comme les élans. Avec Mathieu, nous nous rendons une journée au parc Montgomery Woods. Ce site a conservé d’autres types de géants, des séquoias sempervirens. Plusieurs dizaines de mètres, des troncs énormes. Ils forcent l’admiration. Et puis il y a cette odeur de pin que j’adore. Il ne resterait que 5% de séquoias géants comparé au 19ème siècle, avant la période frénétique d’abattage massif. Leur écorce rougeâtre les rend résistants aux feux, pas à la scie.

Le feu est un élément très présent dans cette région. Je repense à cette histoire du colibri, qui tente d’éteindre le feu avec quelques gouttes dans son bec. Lorsqu’on lui demande s’il pense vraiment qu’il va réussir à éteindre le feu, il répond que non, mais au moins, il aura fait sa part. Il y a beaucoup de colibris chez Halle. Elle les nourrit d’eau sucrée. C’est la base de leur alimentation qu’ils trouvent naturellement dans les fleurs. Chaque jour, nous sommes ébahis de voir ses tous petits oiseaux aux longs becs virevolter à une vitesse folle dans un grand bourdonnement d’ailes.

Beaucoup de colibris et beaucoup de feux. Nous nous retrouvons bloqués une fois sur une route fermée à cause d’un incendie. Situation tristement banale. Cette prairie sèche s’enflamme tellement rapidement. Les incendies sont un fléau permanent. L’année dernière un feu a ravagé plusieurs milliers d’hectares, principalement dans la vallée voisine, la Redwoods valley. Le feu s’est arrêté aux portes de Potter Valley. Malgré la consigne d’évacuation, les Brady sont restés chez eux avec leurs animaux. Ils ont tout arrosé espérant tout sauver. Heureusement pour eux, le feu s’est arrêté avant. Un peu plus loin, près de 200 maisons ont brulé, sans compter le bétail. Le feu est tout puissant ! A la parade de Black Bart (un célèbre bandit qui volait les riches et qui se souciait des pauvres) à Redwood, nombreux sont les hommages aux héros locaux et aux volontaires qui ont combattus le feu et aider les familles. Les camions de pompiers, récents ou antiques, défilent aux côtés d’autres symboles de l’Amérique des pionniers avec de vieux tracteurs John Deer, des cowboys, Davy Crockett le trappeur, des tractions. Défilent aussi l’Amérique de la flambe avec des Camaro et autres voitures de collections plus récentes qui ronronnent ; l’Amérique militaire avec une jeep de la seconde guerre mondiale ; L’Amérique patriotique et l’Amérique de la démesure avec ses chars décorés de drapeaux et tirés par des pick-ups hors normes. Enfin si, aux normes des Etats-Unis. Mathieu reste ébahi par tous ces engins super puissants surélevés, parfois à double roues. Et il y en a partout ! Gros consommateurs de carburant, détruisent tout sur leur passage. Je trouve cela tellement démesuré. Qui, les américains possesseurs de ces engins, essaient-ils de défier ? La nature ? Leurs peurs ?

Nous faisons le plein de confitures et de céramiques (mais comment allons-nous faire tenir tout cela dans nos sacs ?!). Et c’est déjà le moment de quitter la maison des Brady, si attachante, si hippy, si accueillante.