La nuit dans le train n'a pas vraiment profité à mon sommeil. Pourtant, tous les passagers étaient sages comme des bébés. Quelques ronflements, le rythme du train qui s'arrête, qui repart... Je me réveille aux premières lueurs pour apercevoir par la fenêtre la forêt et un lac sous la brume, des trains de marchandises... Puis tout le monde sort petit à petit du sommeil, quelques allées et venues, des tasses de thé fumantes... Mon lit rangé, je sors mon appareil photo et c'est l'occasion d'échanger avec le passager d'en face. Il fait lui aussi de la photo et me montre son travail : il cuisine et prends ses plats en photo pour son blog. Il est de Petrozavodsk et rentre chez lui. C'est marrant car il est assez réservé et sachant que je ne suis pas russe, c'est lui qui n'osait pas me parler de peur que je ne le comprenne pas... Comme quoi les choses peuvent être inversées aussi...

Arrivée à Petrozavodsk à 7h. Le temps de boire un thé et de trouver le bus qui m'emmène chez Nikita, mon hôte couchsurfer pour les 3 prochaines nuits.
Nikita donne des cours privés d'anglais par Skype. Il travaille donc depuis chez lui et apparemment, ça marche très bien puisqu'il a plein d'étudiants. Nikita est grand, le crâne rasé, avec la barbe châtain et des lunettes noires. Il a une silhouette singulière avec des mouvements qui semblent désarticulés, des gestes maladroits. Son allure me fait rire. Il m'offre un thé et m'indique un endroit où je peux aller me promener. Je dois attendre à tel arrêt de bus, demander au chauffeur pour qu'il m'arrête à Solomenoe, de là je demande à quelqu'un de me diriger vers le pont et le chemin qui mène à Chertov Stul. J'aime bien ces jeux de piste à la russe où tu es obligé de te fier aux gens car rien n'est indiqué : pas de plans ni d'arrêts de bus indiqués, pas de panneaux...

Bref, je me retrouve à demander mon chemin à une jeune femme d'ici un peu garçon manqué avec une casquette. Elle finit par m'accompagner une bonne partie du chemin. Au pas de course, nous échangeons sur des banalités. La présence d'une française seule ici a quelque chose de déroutant pour elle. Elle n'a jamais voyagé. "C'est beau la France ? Je n'ai vu qu'à la télé..." " et pourquoi tu es là toute seule ? Normalement, les touristes se déplacent en groupe non?" Et moi de répondre : "moi je préfère voyager comme ça. Tu vois par exemple, je ne t'aurais pas rencontrée si je voyageais avec tout un groupe." Échanges de sourires...

Un peu plus tard, je me retrouve dans la forêt et croise des babouchkas, des grands-mères russes, occupées à leurs sports favoris : ramasser des champignons et cueillir des baies. C'est vraiment quelque chose en Russie ! On les retrouve souvent en ville pour vendre leur production de leur datcha et leur cueillette. Je m'arrête auprès d'une babouchka armée de gants contre les épines en train de cueillir une sorte de baie que je ne connais pas et j'engage la conversation. Je n'ai pas retenu comment s'appelle cette baie, mais apparemment c'est très bon pour la santé. La babouchka avec le sourire : "c'est la première fois que je vois une française en vraie ailleurs qu'au cinéma !" Au moment de repartir, elle me souhaite beaucoup de bonheur...

Arrivée à Chertov stul, c'est un point de vue sur le lac Onega brouillé par la grisaille... Dommage... Les rayons de soleil ne seront pas pour aujourd'hui et la pluie commence à tomber... Je décide de rentrer et pour me consoler me lance en chemin dans la cueillette et dégustation immédiate de myrtilles et de framboises ;-)

Le soir, Nikita me rejoint en ville pour boire un verre. Il est très gentil, curieux et ouvert. Nous parlons de nos expériences de voyage. Il est déjà allé souvent à Paris car sa sœur y habite et y travaille. Il en a un peu marre d'ailleurs de Paris et de l'Europe. Toute l'Europe se ressemble un peu selon lui et il souhaiterait voyager en dehors de l'Europe, dans des endroits vraiment différents. Balade nocturne pour rentrer chez lui où je lui demande de me montrer ses endroits préférés dans sa ville. 
Un petit film typique comique russe des années 70... Et au lit ! Il était temps, je tombe de sommeil...